Vous êtes, chaque semaine, plus nombreux à vous abonner à la page du Cercle des managers éclairés, qui a pour vocation de contribuer au changement positif du monde professionnel à travers la co-construction d’un management Autrement.
Dirigeants, managers, collaborateurs, cette thématique fait-elle écho en vous, d’autant plus dans cette période où la question de sens prend sa place et où le champ des possibles est ouvert pour participer à la construction du monde de demain ?
Le prérequis pour ce changement pourrait bien tourner autour de : « lorsque nous déblayons à l’intérieur de soi, nous déblayons notre extérieur ».
« Nous ne voyons pas le monde tel qu’il est mais tel que nous sommes »
Emmanuel Kant (philosophe allemand)
Et si nous commencions à poser le curseur sur nous-mêmes, comme levier de croissance pour soi, pour l’entourage – son équipe et le système – l’entreprise et le monde.
En changeant de regard sur soi-même, en accompagnant notre changement de posture, plus proche de notre personnalité managériale, en tant que manager, nous vivons notre fonction différemment, acquérons de nouvelles compétences managériales (liées au savoir être) et accompagnons nos équipes à être plus en lien, à grandir, à gagner en autonomie.
La gratitude pourrait bien être une des clés à renforcer et retrouver dans ce nouveau monde. Elle nait de notre connexion à notre cœur. Et, si nous regardions les situations que nous vivons à travers notre intelligence du cœur, nous pourrions voir l’humanité en chacun de nous, y compris la nôtre.
Et si nous montions sur une chaise pour prendre de la hauteur sur le regard que nous portons sur nous-mêmes ?
Avez-vous remarqué comment nous pouvons avoir une facilité à nous autosaboter ? A porter un regard dur vis-à-vis de nous-mêmes ? Entendez-vous cette petite voix à l’intérieur de nous qui juge, dénigre, critique ? Le manager ne déroge pas à la règle pour lui-même et vis-à-vis de ses collaborateurs.
Par exemple, quand vous réalisez une bonne action, vous arrive-t-il de vous dire « OUI »… « MAIS » ? Cette petite voix nous suit depuis des années, nous l’avons apprivoisée et nous n’y prenons plus garde. Bien qu’inconfortable, elle nous permet d’agir en fonction d’un schéma mental répétitif.
Notre petite voix pourrait-elle bien avoir pris le contrôle de nous-mêmes et prendre plusieurs facettes ?
Dans le triangle de Karpman (1968), un des jeux psychologiques de manipulation de la communication, Stephan Karpman, son auteur, a identifié 3 rôles : celui de victime, de sauveur et de bourreau. Lorsque nous sommes piégés dans ce triangle, nous pouvons endosser ces 3 rôles, en alternance ou avec une prépondérance pour l’un ou pour l’autre.
En tant que manager ou dirigeant, pourriez-vous vous reconnaitre dans l’un des ces rôles ?
- Vous arrive-t-il de vous sentir seul, démuni et dans l’impossibilité de vous appuyer sur quelqu’un ?
- Est-il aussi possible de vouloir faire les choses à la place des autres car vous pensez qu’ils n’y arriveront pas ?
- Manifestez-vous parfois de la colère envers un équipier quand, après l’avoir beaucoup aidé, vous ressentez de la trahison face à un de ses comportements ?
Quel comportement pourrait permettre de constater que nous sommes dans ce jeu psychologique ?
Par exemple, j’ai accompagné un dirigeant qui s’est fixé l’objectif d’« avoir une vision positive de moi et m’encourager ».
Je l’ai invité à se questionner sur ce qu’il perdrait et gagnerait en atteignant cet objectif. Il a identifié qu’une de ses plus grandes pertes était liée au rôle de victime qu’il entretenait depuis des années et qu’en prenant ce rôle, cela lui permettait de recevoir de l’attention et de l’intérêt des autres, de ses collaborateurs, de ses pairs ou de sa direction.
Cette prise de conscience lui a permis de constater sa posture d’enfant dépendant du regard et de l’attention de l’autre. Si ce rôle de victime pouvait lui générer du bien-être à un endroit ; il générait aussi des critiques, ce qui le blessait profondément. Cela nourrissait, alors, le cercle vicieux dans lequel il était entré.
A la lecture de ses gains, il a identifié qu’il pouvait se situer dans une relation d’adulte, d’égal à égal, et que les critiques générées par son rôle de victime pouvaient être stoppées ou être gérées différemment et que prendre les rênes de sa vie pouvait le rendre serein et fier de lui.
« Tout est constamment changeant, tout est flux, rien n’est figé une fois pour toutes ».
Philosophie bouddhiste – L’impermanence (sanskrit anitya, pali anicca)
C’est rassurant et anxyogène, n’est-ce pas ?
Cette prise de conscience lui a généré beaucoup d’émotions. Il venait de comprendre qu’il lui était préférable de prendre une autre posture, après 50 années de bons et loyaux services.
Ce témoignage pourrait bien mettre en valeur l’interdépendance entre les individus autour du regard de soi.
Quel est le poids du regard dans le management, dans le relationnel, dans la prise de décision ?
Le regard que nous portons sur nous-même aurait-il une incidence sur le regard que les autres portent sur nous ? Et aussi, le regard que nous portons sur les autres leur permettait-il d’avoir un regard différent sur eux-mêmes ?
Cela vous est-il arrivé de vous sentir gauche, nul, bête avec certaines personnes ou au contraire, vous sentir génialissime avec d’autres ?
En quoi ce phénomène pourrait-il influencer nos pratiques de management, notre manière de manager ?
D’où cela pourrait-il bien provenir ?
Dans le concept de la prophétie d’autoréalisatrice de Robert King Merton et William Isaac Thomas (1948), le regard porté sur autrui a une influence sur ses résultats.
« Si les hommes considèrent des situations comme réelles, alors elles le deviennent dans leurs conséquences ».
Sociologue fonctionnaliste Robert King Merton
Par exemple, « si je crois qu’un collaborateur rend toujours ses dossiers en retard, alors il aura tendance à les rendre après la date fixée ».
Ou encore « si je crois que les autres pensent que je suis « nul », je vais avoir des comportements qui peuvent renforcer cette croyance ».
Ce concept pourrait éclairer certaines situations qui enferment des collaborateurs ou des managers de proximité dans « des boites » dont ils ne sont même pas conscients. Un bon manager pourrait bien être amené à questionner son type de management quand il perçoit des situations qui se répètent.
Et si le manager agissait à partir de son intelligence de coeur ?
La gratitude pourrait une des clés à renforcer et à retrouver dans ce nouveau monde. Elle nait de notre connexion à notre cœur, à notre humanité. Agir à partir de sa personnalité managériale, c’est avoir des pratiques managériales qui nous ressemblent. Et cela pourrait bien amener le dirigeant ou le manager à exercer sa fonction à partir de valeurs amenant à inspirer ses équipes, à les motiver.
En effet, si nous regardons les situations que nous vivons à travers notre intelligence du cœur, nous pouvons voir l’humanité en chacun de nous, y compris la nôtre.
Si, chaque jour, nous prenons le temps de regarder les actions positives que nous avons réalisées ou, simplement, de remercier la chance que nous avons d’être qui nous sommes, nous développons notre intelligence de cœur. Si nous acceptons ce qui nous arrive, si nous nous pardonnons d’avoir fait du mieux que nous pouvions dans une situation donnée ou encore si nous portons un regard de gratitude envers nos interlocuteurs qui font du mieux qu’ils peuvent, nous développons notre intelligence du cœur.
Cette intelligence nous offre la jolie capacité de descendre dans notre humanité et nous permet de gagner en sérénité. Lâcher prise sur une situation, un comportement, le nôtre ou celui d’autrui est un gain d’énergie certain et renforce notre capacité de résilience. L’agilité qui en découle
Le manager de demain développe cette intelligence de cœur et s’affranchit des codes établis par le monde professionnel où la vulnérabilité, l’authenticité, la bienveillance et l’humilité pourraient être questionnées. Cette compétence de leadership pourrait-elle être au cœur de la posture managériale ?
Le Cercle des managers éclairés accompagne les managers à piloter leur business unit de façon différente, à fixer des objectifs qui ont du sens pour l’organisation, à déléguer les tâches en confiance grâce au collaboratif, à passer du directif au participatif, à fédérer les équipes en s’appuyant sur l’intelligence collective, à prendre des décisions justes pour les différents systèmes auxquels il appartient, à impulser la cohésion favorisant l’entraide et l’atteinte des objectifs.
Le management d’équipe est avant tout une fonction de relation. L’écoute – de soi et de l’autre – portée par une bienveillance piquante – à l’inverse de la complaisance – amène de l’agilité comportementale nécessaire aux aspects organisationnels et opérationnels de la réalisation des objectifs. N’est-ce pas aussi cela le rôle du manager ?
Et vous, chers managers, quelle part d’humanité offrez-vous à vos interlocuteurs ? En quoi cette part d’humanité fait-elle partie de votre rôle de manager ?